3 août 2011

Bistro makes my dreams come true

Bistro
On est bien au bar. Vous savez, ce bar sans âge, avec ses chaises en bois rayées par les boutons en ferraille de milliers de 501, ses tables branlantes parce que maintes fois déplacées, branlantes aussi parce qu'on le deviendra tous un peu passé la soixantaine. Ce bar au comptoir métallique témoin de tournées sans fond, de confidences douloureuses, de débats passionnés au fil de l'agenda politique des 6 derniers mandats présidentiels. Témoin aussi de quelques bagarres, conséquences de quelques gestes déplacés ou d'un regard en biais... un peu trop direct. Ce bar, il se fiche de Coste, il se fiche des tendances, il a ses habitués. Des locaux, bien sûr, mais aussi les gens de passage qui viennent le voir, lui précisément, parce qu'ils savent quelles sont ses règles. Ils les connaissent forcément, ils ont le même rade en bas de chez eux, dans les arrondissements d'à côté. Là-bas aussi, il y a une Mireille ou une Jacky, la cinquantaine bien tassée, le verbe haut et le coude en angle droit, toujours prolongé d’un Chablis village. Elle fait remarquer encore une fois au patron combien le quartier a changé, comme "c'était mieux avant". Lui est d'accord, et d'ailleurs son avis compte forcément, ça fait 30 ans qu'il astique des verres le regard fixé vers l'extérieur. Il l'a vu changer le quartier. Dans son rade, là-bas, lui aussi à son Francis ou son Kader. Silencieux, le bonhomme, lui ne regarde que la litanie incessante des tirages de Rapido. Faut pas le déranger, l'est "concentré" qu'il dit. On a bien essayé de lui faire comprendre que le Rapido, c'est une arnaque, mais rien n'y fait. "Occupe-toi de ton godet", qui répond. Les bons jours, il va aligner plus de cinq mots pour répondre que son collègue, "c'est 30 000 francs" qu'il avait gagné au Loto, un jour. Et que "ça c'est pas des conneries", qu'il aura aussi sa chance un jour. Un jour. C'est aussi ça le bistro, une part de rêve qu'on vise ou que l'on abandonne sur le comptoir. Que l'on réalise ? Rarement, mais tout dépend du rêve. Le mien, c'est juste de passer de bons moments entre copains. Merci les bistros de réaliser mes rêves. Longue vie à vous.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire